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Comme un air oublié
Cela fait si longtemps, des jours, des semaines, des mois ou des années, je ne sais plus, depuis que tu es face à moi j’ai perdu la notion du temps et de l’espace qui se sont infiltrés entre nous. Une table et un café nous séparent. Tu me racontes ces points suspendus entre cet hier et maintenant, me demande « et toi », le visage légèrement penché, le regard curieux. Je t’écoute, te réponds te questionne, agitation vaine du vent, car je ne suis pas vraiment là.
Je suis tout à côté de toi, une main effleurant ta tempe, ta joue, tes lèvres, te murmurant à l’oreille tout ce qui restera en moi. Tout ce que je ne t’ai jamais dit, l’histoire telle que je l’ai écrite il y a un jour, un an ou un siècle. Tous ces petits reliefs dessinés dans la mémoire, gravés là on ne sait pourquoi. Et ces restes de gravats cachés sous le silence, ces colliers de pluie enfouis dans l’oubli.
Tu me parles de ta vie, ton travail, tes amis, avec cette lueur au fond de la prunelle, qui me rappelle…
Un air oublié, un monde parallèle.
Et moi, je te confie même ce que je croyais enfui, effacé. Une absence, une amnésie.
Puis le temps reprend son heure. Tu regardes ta montre, un air de regret, tu dois y aller. Un sourire un brin nostalgique : « Tu ne m’as presque rien dit de toi ». Tu enfiles ta veste, tu sembles attendre quelque chose, un geste, une parole ?
« Je t’ai tout dit ».
Juste une question d’angle. Et de rêverie. Et puis tu n’as jamais su écouter mes silences.
Je te regarde t’éloigner. Tu t’évapores comme un souvenir.
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