Echappée terrestre

C'est de l’amour qui crisse, de l’amour qui cisaille, déraille, du sentiment qui disjoncte, qui déraisonne, résonne dans les tripes comme une souffrance insoumise, une douleur inépuisable à l’encre folle. Insupportable. Parce qu’obsessionnel. Une force centripète qui raye les contours du monde. Plus rien n’existe. Sauf l’objet de la passion. Invivable. Etouffant. Annihilant.

A ce stade d’intoxication, il ne reste plus guère de solutions. En vrac, le suicide, l’exécution de l’amant, la psychothérapie avant l’asile. Toutes les balises internes clignotent un seul mot : urgent, urgent. Les cellules s’affolent, le danger palpite. Elle est à bout.

Alors elle allume une cigarette et décide d’aller prendre l’air. Démarche chaloupée, un bar, un verre, pour oublier. Station attente, les jambes entrelacées sur un tabouret face au comptoir. Réverbère de l’errance nocturne. Chassés-croisés de regards. Une tignasse brune qui s’enflamme. Deuxième whisky, pour oser. Dans la rue, il l’embrasse doucement. Hôtel. Impasse et pair. Qui perd gagne ? Mélange des corps, de sueur, de solitudes décomposées. Un brin de désespoir, un brin d’humanité, quelques traces de tendresse éparpillées.

Petit matin frissonnant de ces nuits où l’on n’a pas dormi. Une odeur de café qui traîne. Elle marche seule, lentement, un sourire tressaille enfin, timidement. L’univers palpite de couleurs.

 


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