4 : Mon frère

Il est perdu dans son monde, un monde souterrain, aérien, où il s’envole dans on ne sait quelles profondeurs. Quand on lui parle, il n’entend pas de suite, il lui faut le temps de redescendre, de s’arracher à ses songes.

Romantique ? Evanescent ? Mystérieux ? Gente demoiselle qui passe, crois-y toujours, ça t’occupera quelques mois. Car il est plus égocentrique qu’un nourrisson. Passe une bonne partie de son temps à s’explorer devant la glace, à la recherche d’un bubon ou d’une pustule, non, d’un infime point noir que même un microscope ne détecterait pas.

Quand il a un rhume ou toussote vaguement, c'est comme si la foudre venait de s’abattre sur lui. SOS Médecin, le Samu et les pompiers sont immédiatement sollicités en haute instance. Il a dû être un roi quelconque du 16e ou 17e siècle avec tout un peloton de médecins plantés en permanence au pied de son lit. Autant le dire clairement : il est très chiant. Impossible d’avoir une conversation suivie avec lui, sauf si elle le concerne. Sinon, il fait « mmh, ah ah, oui » tout en s’examinant les mains, les bras, le poil n°4857 bizarrement un peu plus long que les autres. Ou pense clairement à autre chose, ce qu’il va mettre pour sortir, son prochain cancer, sa dernière altercation au boulot, etc. Tout ce qui ne le touche pas directement est indigne d’intérêt.

Je suis donc toujours très étonnée quand il rapporte une petite amie à la maison. Bien sûr, je me demande ce que cette fille peut bien puiser en lui, mais surtout, suis perplexe pour mon frère : comment parvient-il à faire l’amour ? A ce niveau de centrisme, seule la masturbation peut lui apporter du plaisir.


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