8 : Mon oncle Armand

Il est tombé dans un bénitier quand il était petit. A épuisé trois curés comme enfant de chœur, à sermonner les petites vieilles qui ne donnaient pas assez, les jeunes filles qui donnaient trop d’elles-mêmes, etc. Forçait ses sœurs à se confesser auprès de lui mais ne les absolvait jamais. Devant ses tendances dictatoriales, les Ordres ont préféré se passer de ses services. Il a fini par se marier. Et là, son calvaire a commencé.

Bien entendu, il n’a pas épousé n’importe qui mais le clone de Ste-Bernadette, après une longue quête auprès de toutes les communautés de la région. Il voulait une femme dévote, son bonheur, au début, a été total. Ensemble, ils militaient pour le rétablissement des mâtines et des vêpres. En attendant, ils priaient devant chaque crucifix cloué dans leurs nombreuses pièces, au moins cinq fois par jour, en direction du Vatican.

Après quelques années, ses hormones refoulées ont gangrené son cerveau telle une métastase. Il a commencé à surveiller ma tante, à l’accuser de contempler le prêtre d’un œil coquin. Malgré ses protestations, ils ont déménagé dans une paroisse tenue par un curé antédiluvien. Sa suspicion l’a démangé à nouveau peu après : il ne supportait plus qu’elle parle à un enfant de chœur, à un membre de la paroisse. S’il avait pu, il l’aurait murée. A défaut, il lui a interdit de sortir, même pour se rendre à la messe.

Dernièrement, il s’est rendu compte qu’elle priait avec beaucoup trop de ferveur, caressant le corps dénudé de Jésus d’un regard passionné. Il lui a demandé si elle l’aimait plus que lui. Puis il a décroché tous les crucifix et proscrit toute prière. Même à la Vierge Marie : qui sait ce que sa femme pourrait lui demander ?


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